- BIJOUX (Moyen Âge)
- BIJOUX (Moyen Âge)BIJOUX, Moyen ÂgeL’évolution des bijoux au cours du Moyen Âge suit celle du style et des techniques de l’orfèvrerie.Un grand nombre d’objets du haut Moyen Âge nous sont parvenus grâce à la coutume d’ensevelir les morts accompagnés de leur parure. Les bijoux retrouvés dans les tombes manifestent le goût de cette époque pour l’or et pour le décor de pierres et verres colorés, souvent sertis à froid dans un réseau géométrique formé par des cloisons soudées préalablement, selon la technique de l’orfèvrerie cloisonnée. L’ensemble mis au jour à Saint-Denis en 1959 est tout à fait exemplaire: il comportait deux fibules circulaires en orfèvrerie cloisonnée, trois épingles, des garnitures de baudrier, de chaussures et de jarretières, des éléments de ceinture, ainsi qu’un anneau d’or portant une inscription et un monogramme, lus ARNEGUNDIS REGINE, ce qui conduisit à identifier la défunte avec Aregonde, l’une des femmes de Clotaire Ier (497-561).Les bijoux conservés de l’époque carolingienne sont beaucoup moins nombreux. Les textes décrivent Charlemagne et son entourage parés, lors des cérémonies importantes, de diadèmes, colliers, pectora et agrafes d’or enrichis de pierres précieuses, mais très peu d’objets permettent de confirmer l’existence de ces ornement luxueux. Le pendentif connu sous le nom de Talisman de Charlemagne (Trésor de la cathédrale, Reims) est sans doute postérieur au règne de l’empereur et date plus probablement de la seconde moitié du IXe siècle; il est cependant un exemple de ces bijoux portés sur la poitrine mentionnés par les textes. Quelques pendentifs de cristal de roche gravé sont également conservés; le plus somptueux est celui dit «de Lothaire», orné de scènes de l’histoire de Suzanne faisant sans doute allusion à l’affaire du divorce de Lothaire II (795-869), qui provient de l’abbaye de Waulsort (British Museum, Londres). Autre décor typique de l’art carolingien, l’émail cloisonné sur or, recouvre la couronne du Trésor de Monza, selon des motifs proches de ceux de l’autel d’or de Milan, don de l’évêque Angilbert.Dans la partie orientale de l’ancien empire carolingien, les souverains ottoniens (936-1024) puis saliens (1024-1125) se veulent les successeurs des empereurs carolingiens. Quelques parures précieuses exécutées à leur demande sont conservées, comme la Couronne du Saint Empire (Schatzkammer, Vienne), dont le décor associe or, pierres précieuses et émaux cloisonnés: le bandeau fut exécuté pour Otton Ier ou Otton II dans la seconde moitié du Xe siècle, tandis que l’étrier fut ajouté pour le couronnement impérial de Conrad II en 1027. L’ensemble de bijoux découverts à Mayence en 1880 (Kunstgewerbemuseum, Berlin, et Landesmuseum, Mayence) appartint très probablement à une impératrice, que l’on a proposé d’identifier avec Gisela, épouse de Conrad II, ou avec Agnès, épouse de Henri III (1017-1056). Certaines pièces, principalement un collier et un grand ornement de poitrine, témoignent d’une forte influence byzantine, tandis que d’autres, comme le fermail circulaire et la fibule émaillée ornée d’un aigle présentent d’étroits parallèles avec l’orfèvrerie de la première moitié du XIe siècle.Peu de bijoux de l’époque romane sont conservés. Ce sont surtout des anneaux, comme ceux, au décor très simple, mis au jour à Lark Hill, en Angleterre (British Museum, Londres), avec des monnaies de l’époque de Henri Ier (1069-1135) ou celui qui aurait été trouvé dans la tombe de l’évêque Maurice de Sully (1120-1196) à Notre-Dame de Paris (Louvre) dont le jonc porte un décor niellé associant monstres et rinceaux.Si les couronnes des rois et reines de France autrefois conservées à Saint-Denis ont disparu, les bijoux du XIIIe siècle nous sont cependant parvenus en plus grand nombre; ils peuvent être répartis en différents groupes selon le type de leur ornementation. Ainsi, quelques-uns, notamment un fermail conservé au Metropolitan Museum de New York et une boucle de ceinture, au musée de Stockholm, portent un décor figuré typique du style 1200; d’autres, principalement une couronne (musée de Stockholm) et un groupe de fermaux (Bargello, Florence; Landesmuseum, Mayence; musée d’Unterlinden, Colmar) sont revêtus de filigranes. De nombreux bijoux de cette époque sont ornés de petits motifs végétaux, animaliers, et parfois de personnages, enserrés ou non dans des rinceaux; un groupe, comportant deux couronnes dont les éléments sont aujourd’hui remontés sur une croix (Trésor de la cathédrale, Cracovie) et des fermaux (British Museum et Victoria and Albert Museum, musée de Budapest), pourrait être de fabrication vénitienne. Plusieurs types de décor sont parfois associés: sur l’Onyx de Schaffhausen, le camée antique a reçu une monture au décor de pierres précieuses et petits animaux, dont le revers est gravé d’une figure de fauconnier de style 1200, entourée d’une inscription permettant de l’identifier avec le comte Louis III de Froburg (mentionné entre 1201 et 1259).Au XIVe siècle, le goût des pierres précieuses s’épanouit dans un groupe de bijoux dont elles constituent l’ornementation unique ou principale, comme le fermail circulaire du musée de Stockholm, celui «à fleur de lis» provenant de Saint-Denis (Louvre), sans doute exécuté à Paris dans le deuxième quart du XIVe siècle, celui «à l’aigle» du musée de Cluny, probablement originaire de Bohême et réalisé vers le milieu du siècle, ou encore la couronne de Munich, aux grands fleurons d’inspiration florale, mentionnée dans le Trésor royal anglais en 1399. Sur les deux fermaux trouvés à Vérone en 1938 (Museo di Castelvecchio, Vérone), les bâtes qui portent les pierres précieuses sont semblables à celles placées sur la Pala d’oro lors de l’«enrichissement» de 1343-1345, ce qui confirme leur origine locale et permet de les dater vers les années 1340-1350. D’autres bijoux ornés de pierres précieuses, parfois associées à des émaux de plique, comme sur la couronne du Bargello ou les ceintures placées sur la Sainte Foy de Conques, présentent aussi ce type de bâtes, témoignant ainsi du rayonnement des bijoux vénitiens.Certains bijoux du XIVe siècle sont ornés d’émail translucide de basse-taille, tels le reliquaire de la Sainte Épine, œuvre française du milieu du XIVe siècle, la ceinture d’Oxford, probablement exécutée en Angleterre, ou un groupe de ceintures d’origine italienne, comme celle du musée de Cleveland ou celle récemment retrouvée à San Frediano de Lucques dans le tombeau de sainte Zita.Aux environs de 1400, l’art du bijou connaît un apogée au moment du gothique international, caractérisé notamment par le goût du luxe, du raffinement et de la préciosité. À l’or et aux pierres précieuses, désormais généralement taillées à facettes, est associée une nouvelle technique de l’émaillerie apparue vers le milieu du XIVe siècle: l’émail opaque sur ronde-bosse. Le plus somptueux exemple en est sans doute le Collier Hohenlohe, où des branchages noueux revêtus d’émail blanc portent en pendentif une tête de fou; des fermaux, tels ceux du Trésor d’Essen, aux motifs variés, celui du Bargello, orné d’un dromadaire, ou celui de la Schatzkammer de Vienne, figurant un couple d’amoureux, témoignent du renouvellement des techniques, mais aussi de l’iconographie des joyaux créés pour les cours au début du XVe siècle. L’apparition de bijoux-portraits est une autre manifestation de cet intérêt pour de nouveaux thèmes: sur l’anneau de Jean sans Peur, duc de Bourgogne (1371-1419), conservé au Louvre, comme sur le pendentif du Bayerisches Nationalmuseum de Munich, figurant Jean de Lancastre, duc de Bedford (1389-1435), le profil du personnage est taillé dans une calcédoine blanche, entourée d’autres pierres dures et d’or émaillé. Les bijoux du duc de Bourgogne pris à la bataille de Grandson en 1476, disparus mais connus par des reproductions aquarellées (musée de Bâle) sont sans doute les meilleurs exemples de la généralisation de ces tendances nouvelles, notamment de la taille des pierres précieuses, parmi lesquelles le diamant est désormais fréquemment utilisé.
Encyclopédie Universelle. 2012.